Pour Roland Desbordes, président de la CRIIRAD (Commission de  Recherche  et d’Information  Indépendantes  sur la Radioactivité), la radioactivité entraîne un risque sanitaire élevé sur des zones étendues au Japon. Les autorités auraient dû évacuer les habitants de ces zones, estime-t-il.

Sciences et Avenir.fr : La CRIIRAD a mené du 24 mai au 2 juin une mission au Japon. Quelles en sont les principales conclusions ?

Roland Desbordes : Nos deux envoyés sont revenus plutôt choqués par la situation actuelle au Japon. Il se passe des choses graves. Une partie de la population japonaise habite actuellement des zones où les niveaux de radioactivité sont élevés et sources de risques sanitaires graves. Dans la ville de Fukushima, située à 70 Km de la centrale et donc en zone dite normale, les immeubles et l’intérieur des maisons sont contaminés ce qui provoque une irradiation externe importante.

De plus les habitants de ces zones consomment des aliments également contaminés parce que bien souvent ils n’ont rien d’autre à manger. Il n’y a pas de surveillance vraiment complète de la chaîne alimentaire et une forte désinformation de la part des autorités japonaises. Les gens sont livrés à eux-mêmes.

Que faudrait-il faire selon vous ?

Il faudrait évacuer les populations sur un périmètre beaucoup plus large que la zone rouge actuelle qui est de 20 km. En tenant compte des vents au moment des émissions, qui ont commencé dès le 12 mars, les évacuations auraient dû au moins concerner tous les habitants vivant dans les 80 km au Nord-Ouest de la centrale. Ils courent un risque inacceptable. D’ailleurs je rappelle que dès le début de la catastrophe, les autorités américaines ont recommandé aux ressortissants vivant au Japon d’évacuer une zone de 80 km justement, ce n’est pas pour rien. Evidemment on parle là du déplacement de plusieurs centaines de milliers de personnes.

D’autre part l’ensemble des aliments doivent être contrôlés et les mesures de radioactivité bien plus fréquentes. Pour vous dire, même au niveau de la centrale, la TEPCO ne contrôle la qualité de l’air que 20 minutes par jour ! Il y a clairement un défaut concernant la gestion post-accident. On se sait même pas quelles sont les mesures prévues  en cas de nouvel accident à Fukushima, c’est très inquiétant.

Vous remettez également en cause la gestion de la crise par les autorités ?

Tout à fait, au vu des réactions dans les moments qui ont suivi les premiers incidents à la centrale on est obligé de faire un constat. Soit elles n’étaient absolument pas préparées à faire face à un accident nucléaire (comme si un tel scénario n’avait jamais été envisagé) soit il y avait une volonté de cacher la gravité de l’accident.

Quoiqu’il en soit les habitants n’ont pas été mis à l’abri immédiatement ni  évacués sur un périmètre suffisant, ni confinés. Il n’y a eu aucune distribution de pastilles d’iode et quand des municipalités ont voulu en organiser on le leur a interdit. Bref, les autorités n’ont pas pris les bonnes initiatives, comme à Tchernobyl, et ont bloqué la diffusion des informations.

Comment réagit le peuple japonais, en a-t-il conscience ?

Bien sûr, contrairement à ce qu’on a pu laisser croire, dès le début les Japonais ont senti que c’était grave et ont été en demande d’informations. Et leur légitime inquiétude ne fait que croître avec le temps. Récemment 20.000 femmes ont manifesté pour clamer leur désarroi et leur angoisse pour leurs enfants. C’est quelque chose qu’on ne voit jamais là-bas. La CRIIRAD a rencontré des citoyens qui voulaient se former à l’utilisation du matériel de contrôle de la radioactivité  nous les aidons à monter un organisme de contrôle indépendant.

Propos recueillis par Joël Ignasse
© 2011 – Sciences et Avenir.fr
– 30/06/2011 – Article original

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