Des statuettes de terre cuite représentant des hommes barbus maniant une épée ornent les toitures de quelques habitations traditionnelles au Japon. Ce personnage légendaire, originaire de Chine, aurait surtout le pouvoir d’écarter les esprits malfaisants des foyers.

Un pourfendeur de démons, trônant sur l'auvent d'une maison urbaine (Kyôto) © Jean-François Heimburger
Un pourfendeur de démons, trônant sur l’auvent d’une maison urbaine (Kyôto)
(© Jean-François Heimburger)

Dans le quartier de Gion-higashi, à Kyôto, de nombreux touristes espèrent photographier une geisha en parcourant Hanami-kôji, littéralement «ruelle de la contemplation des fleurs». Voilà un nom qui tomberait à pique durant la période de floraison des cerisiers. En réalité ces fleurs désignent les artistes, appelées ici geiko, ou maiko s’il s’agit d’apprenties. Il arrive qu’elles apparaissent furtivement, sur le chemin qui les mène chez leur maîtresse de danse, à leur cours de musique ou à une maison de rendez-vous.

Mais ce quartier renferme d’autres curiosités, qui passent souvent inaperçues. Il suffit pourtant de lever les yeux vers les avant-toits des belles maisons aux antiques façades pour découvrir les statuettes. Faites en tuile gris argenté, elles représentent des hommes barbus appelés Shôki-san («Monsieur Shôki»). Mais leur taille est un trompe-l’oeil : une épée le plus souvent à la main droite, ces guerriers d’origine chinoise ne sont pas que là pour décorer. Censés protéger les maisons des esprits malveillants, ils sont aussi efficaces contre les incendies et les maladies. «On en compte environ 3 000 dans la ville de Kyôto», estime Masaki Ozawa, auteur de Let’s Find Out Shoki-san!!.

Les liens culturels importants avec le continent asiatique ont laissé un héritage de coutumes et de croyances au Japon. Après le bouddhisme et le système d’écriture, les éléments principaux de la civilisation chinoise sont introduits dans l’Archipel à partir du VIIe siècle. La tradition liée à ces êtres protecteurs a ainsi été importée pendant la période Heian (794-1185).

Selon la légende, après le suicide de Zhong Kui (Shôki en japonais) suite à son échec à l’examen impérial, le fondateur de la dynastie Tang lui offrit de belles funérailles en hommage. Pour exprimer sa reconnaissance, Shôki se manifesta des années plus tard dans le rêve du sixième empereur chinois, alors mal en point, et chassa les démons qui l’assaillaient. Le souverain se réveilla guéri, puis fit dessiner le personnage qui lui était apparu. Depuis ce jour, ce dessin est censé protéger les foyers dans lesquels il est accroché. «Ce n’est qu’une légende, qui s’est toutefois propagée jusqu’au Japon sous l’influence du taoïsme», explique Masaki Ozawa. Les statuettes de terre cuite ont quant à elles probablement surgi au début du XIXe siècle, en prenant place sur les auvents des habitations.

Geishas et pourfendeurs de démons cohabitent parfaitement ici et ont quelques points communs. D’abord, tous deux voient leur nombre diminuer, la coutume devenant selon certains peu à peu obsolète. Ensuite, ils ne se cantonnent pas uniquement à Kyôto: si l’on croise encore des geishas dans d’autres régions, telle Tôkyô ou Gifu, il est également possible de découvrir de belles statuettes dans d’autres préfectures, comme Ôsaka, Nara ou Shiga. Histoire de donner quelques pistes aux chercheurs de trésors et autres chasseurs d’images.

Jean-François Heimburger – Zôsui

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