Conçu par le cinéaste et metteur en scène François Girard, ZED, premier spectacle permanent du Cirque du Soleil au Japon, raconte l’histoire de deux mondes celui des hommes et celui des femmes qui se rencontrent grâce au fou qui donne son nom au spectacle. Un spectacle d’abord basé sur la performance humaine.

Sur scène, un artiste. Un seul. Son nom: Seishi Inagaki. Le Japonais jongle avec des bâtons de majorette, les fait rouler sur son cou et autour de ses coudes.

Un peu plus tard, un autre numéro. Ici, des artistes forts comme des boeufs font voler leurs partenaires. À un moment, ils sont quatre de haut, montés les uns sur les épaules des autres avec, au sommet, une femme sur une seule jambe tenant dans la main de son partenaire.

Quel lien y a-t-il entre ces deux numéros présentés aux journalistes japonais en juin? L’absence de technologie. Dans les deux cas, la performance repose sur la force et l’agilité humaine. Pas de scène qui bascule, pas de boule qui sort du plafond, pas de piscine qui apparaît sous la scène. ZED, le premier spectacle permanent du Cirque du Soleil au Japon, est d’abord basé sur la performance humaine.

Ce spectacle sera «plus acrobatique que technologique. Il y a beaucoup de corps humains dans ce spectacle-ci», avance Gilles Ste-Croix, vice-président principal au contenu créatif, dont le boulot consiste à superviser l’aspect artistique de tous les spectacles de la troupe.

Autrement dit, pour ceux qui ont vu d’autres spectacles du Cirque, la création se situe plus dans la lignée de Saltimbanco que du très technique Ka, de Robert Lepage. Et c’est voulu ainsi.

Comme on est dans un complexe de Disney, le spectacle se veut familial. «C’est une orientation qui vient du marché, explique encore l’ancien échassier de Baie-Saint-Paul. On n’a pas oublié qu’il y avait des enfants.»

Le concepteur et metteur en scène François Girard (Le violon rouge, Silk) promet pourtant qu’il y en aura, de la technique. «Il y a plein de monde en l’air, qui vole», dit-il en entrevue, enfilant cigarette sur cigarette, collé contre un mur du théâtre pour éviter la pluie qui tombe dru. «Il y a beaucoup de technique, mais je pense qu’on a fait un gros, gros effort pour la faire disparaître.»

Évidemment, pourrait-il ajouter, puisqu’on est dans un spectacle du Cirque

Des personnages issus du tarot

L’histoire de ZED est celle de deux mondes, celui des hommes et celui des femmes. ZED, un fou inspiré par les personnages de tarot, tente de les réunir tout au long du spectacle.

«Même pour ceux qui connaissent bien le tarot, le spectacle ne ressemblera pas au tarot, prévient toutefois François Girard. Je suis allé chercher une matrice de personnages que j’ai trouvés dans le tarot, parce que, le tarot, c’est un reflet de l’humanité, c’est un miroir. J’y ai volé les personnages, les quatre éléments, le ciel et la terre.»

Son travail : voir à ce que l’histoire et l’émotion se rendent au public, agir comme premier spectateur. Et ça, c’est vrai que le touche-à-tout oeuvre au théâtre, au cinéma ou l’opéra. «Le Cirque du Soleil, ça ne ressemble à rien d’autre, comme structure, comme façon de travailler. C’est un monde en soi. En même temps, moi, mon travail, il reste le même. Je suis le public avant que le public arrive. Je suis assis dans la salle et j’essaie de bouger des choses pour que le public voit des choses, sente des choses, comprenne des choses.»

Mais quand même, un acrobate qui s’élance sur un trapèze et une contre-alto à l’opéra, il y a une petite différence, non? «Au théâtre, si tu as douze acteurs, tu as douze façons de travailler. À l’opéra, tu as 10 chanteurs et chacun a son histoire, ses forces, ses faiblesses, dit-il. Ici, c’est la même chose On a fait huit semaines de jeu à Montréal, on a fait de l’impro, on a fait du chant. Puis j’apprends à comprendre la gang. Un moment donné, il y a des choses que tu peux faire avec certaines personnes et que tu ne peux pas faire avec d’autres.»

François Girard a des atomes crochus avec le public japonais depuis une bonne quinzaine d’années, alors qu’il était venu y faire la promotion de 32 films brefs sur Glenn Gould. Il adore ce «public sophistiqué et éduqué» pour qui il est en train de monter un «one-woman show», qui sera également présenté à Montréal en 2010, à l’Usine C. L’histoire est adaptée du roman Le fusil de chasse, du Japonais Yasushi Inoué.

«C’est pour sa sensibilité à la culture japonaise que j’ai pris François», dit Gilles Ste-Croix.

Le principal intéressé ne s’en plaint pas, loin de là. «Entre vivre à Tokyo et vivre à Vegas, j’aime mieux vivre à Tokyo.»

On l’avait deviné.

La création par l’isolement

Trois nouveaux spectacles cette année, trois autres l’an prochain et encore trois en 2010. Le Cirque ne risque-t-il pas de manquer de souffle?

Fraîchement débarqué de l’avion, en train de prendre son petit-déjeuner, le grand patron du Cirque partage sa recette : «On a isolé les équipes de création, explique-t-il. Ça évite que les gens soient préoccupés par deux projets en même temps.»

Ainsi donc, ils ont beau être 4000 à bosser au Cirque, ils ne sont que trois à être impliqués dans tous les projets : lui, Guy Laliberté et Gilles Ste-Croix, le v.-p. principal à la création. «Cette structure de travail, c’est ce dont je suis le plus fier, précise-t-il encore, parce que ça maintient la mentalité de l’époque.»

Dans sa «lutte de tous les instants pour ne pas devenir une entreprise traditionnelle», le Cirque investit aussi dans ce que d’autres appelleraient la recherche et le développement. Trois femmes ont pour boulot d’éplucher des revues et Internet afin de trouver ceux qui innovent le plus sur la planète, que ce soit dans le domaine de la couture ou du maquillage. «C’est notre groupe tendance, pour ne pas être dépassé.»

Gilles Ste-Croix fait aussi sa part pour trouver les plus flyés des artistes. Il se rappelle une de ses soirées de recherche de nouveaux talents à Moscou. Le Bolshoi ou le Cirque de Moscou, très peu pour lui. «C’est folklorique, lance-t-il, c’est comme la Bottine souriante!» Il préfère le milieu underground moscovite, là où la soirée se passe à regarder le spectacle assis sur des coussins et se termine tard dans la nuit.

Mais ils ont beau parcourir la planète à la recherche de talents, ce qui frappe quand on visite le Cirque à l’étranger, c’est cet accent qu’on entend partout et qui rappelle la maison. Et pour ceux qui ne connaîtraient pas ses racines, Gilles Ste-Croix se fait un devoir, devant les journalistes de Macao ou à Tokyo, de leur parler de ses débuts sur des échasses à Baie-Saint-Paul.

ZED, présenté au Tokyo Disney Resort – la première mondiale est prévue le 1er octobre prochain.

Stéphane Paquet

La Presse

Tokyo

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