Bien qu’elle se soit produite avec en toile de fond le débat politique sur la désignation d’un nouveau premier ministre, la tempête financière mondiale n’a été, au Japon, qu’un sujet parmi d’autres pour les candidats. La seconde économie du monde est relativement épargnée par la bourrasque du money game, a pu déclarer, non sans satisfaction, le futur premier ministre Taro Aso.

L’indice Nikkei a certes chuté de 3,8 % en début de semaine dernière pour rebondir et enregistrer une hausse de 1,4 % lundi 22 septembre, veille d’un jour férié au Japon. Les actions des deux principaux créanciers de Lehman Brothers, Aozora Bank et Mizuho Corporate Bank, ainsi que celles de Sumitomo Mitsui Financial Group, moins exposé, ont plongé. Quant à la filiale japonaise de Lehman Brothers, elle a déposé son bilan avec un passif de 3 400 milliards de yens (21,8 milliards d’euros), soit la plus grosse faillite du pays après celle de l’assureur Kyoei Life en octobre 2000, depuis la défaite de 1945. Les entreprises japonaises exportatrices souffriront des effets de la crise financière sur le marché américain. Mais les dommages ont été limités.

La Banque du Japon, qui a injecté la semaine dernière 10 puis 6,7 milliards de dollars (4,5 milliards d’euros) dans le marché bancaire, estime que le système financier nippon devrait moins souffrir que ses homologues américain et européen. Meilleure évaluation du risque ? Jusqu’à un certain point : échaudées, les institutions financières ont limité leurs expositions. Elles sont restées prudentes dans le jeu des produits financiers innovants et en particulier des subprimes. Selon le Fonds monétaire international, elles n’ont perdu que 8 milliards de dollars avec les prêts hypothécaires immobiliers sur les quelque 1 000 milliards envolés.

Leur frilosité leur a permis en revanche d’engranger les liquidités et de réduire ainsi leur vulnérabilité en cas de tension du marché. Avec une épargne de 14 000 milliards de dollars qui, même si l’on tient compte de la colossale dette publique, fait de l’Archipel le premier pays créditeur de la planète, le système financier nippon est capable de se refinancer par lui-même : une grande force dans la situation chaotique actuelle.

Le Japon a durement souffert de l’éclatement de la « bulle spéculative » de la fin de la décennie 1990. L’Archipel a mis près de dix ans à s’en remettre (la « décennie perdue »), au fil de douloureux efforts pour apurer les comptes de ses banques « plombées » par des mauvaises créances. Le taux interbancaire est resté faible (0,7 %). Et, aujourd’hui, le secteur financier nippon est pourvoyeur de liquidités plus qu’il n’est demandeur. Une revanche, lorsque l’on se souvient qu’il y a dix ans, au plus sombre de la crise financière, les banques japonaises avaient beaucoup de difficulté à lever des fonds sur le marché international sinon à payer un taux d’intérêt plus élevé (Japan PreMium).

Assises désormais sur leurs liquidités, elles regardent l’incendie de l’autre coté de la rivière. Juste retour des choses, les contrôles rigoureux imposés par les Etats-Unis aux banques japonaises à la suite de la crise asiatique restreignent l’accès de leurs propres banques à la dernière source stable de crédit de la planète.

Si le Japon recueille les dividendes d’une frilosité, fruit de l’amère leçon de la crise financière de la fin de la décennie 1990, il est aussi captif de sa montagne de bons du Trésor américain et il doit oeuvrer, comme les autres, à assainir la situation.
Philippe Pons

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