Par David Dolan et Nathan Layne

TOKYO (Reuters) – Au bord du gouffre voici quelques années et symboles d’une conjoncture économique fort morose dans la deuxième économie mondiale, les banques japonaises participent maintenant au remodelage du paysage bancaire mondial.

Nomura Holdings, la première société de courtage japonaise, met la main sur les opérations asiatiques et européennes de la banque d’investissement américaine en faillite Lehman Brothers, moyennant 525 millions de dollars pour les premières, tandis que Mitsubishi UFJ Financial, première banque nippone, achètera jusqu’à 20% de Morgan Stanley pour 8,5 milliards de dollars au plus.

Du coup certains pensent que Goldman Sachs, qui, comme Morgan Stanley, va se transformer en banque commerciale, pourrait se tourner vers Sumitomo Mitsui Financial Group (SMFG), la troisième banque nippone avec laquelle elle entretient une relation ancienne.

Jadis considérées comme trop prudentes et inexpérimentées pour le monde à haut risque et à haut rendement de la banque d’investissement, les établissements japonais, débordants de ressources, font leur retour en force.

« L’équilibre des pouvoirs a changé spectaculairement ces deux dernières semaines dans le secteur financier mondial », commente Shinichi Ina, analyste de Credit Suisse à Tokyo. « Je pense que personne ne pouvait imaginer voici quelques mois que Mitsubishi prendrait Morgan Stanley dans son giron; je crois qu’elle-même ne pouvait l’imaginer ».

Les établissements financiers nippons ont pour l’essentiel évité les pertes massives qui ont mis les firmes financières de Wall Street en lambeaux. A la différence de leurs homologues occidentales, Mitsubishi UFJ et d’autres ont le plus souvent évité les investissements les plus risqués après avoir frôlé la catastrophe voici quelques années, ne devant leur salut qu’à une avalanche de deniers publics.

A présent, le maelstrom dans lequel est pris Wall Street a fait disparaître purement et simplement le modèle de banque d’investissement qui y avait prévalu pendant plus de 20 ans.

ASSAUT SUR LE REGIONAL US

L’accord passé entre Mitsubishi UFJ et Morgan Stanley accélèrera la transformation de l’établissement américain en une banque commerciale, améliorant ses chances de survie car il aura accès aux 1.100 milliards de dollars de dépôt de la banque nippone.

« Dans ce nouvel environnement, on admet je pense l’importance d’avoir des investisseurs stables et des affiliations avec de grandes institutions de dépôt, et dans ce domaine MUFG excelle », dit Jason Rogers (Barclays Capital).

Mitsubishi UFJ en retour siègera au conseil d’administration de Morgan Stanley.

Dans la mesure où la conjoncture économique locale ne s’est pas beaucoup améliorée et où la population décline, les banques nippones recherchent de plus en plus des opportunités de croissance à l’étranger.

Les acquisitions à l’étranger par les banques japonaises totalisent 12,5 milliards de dollars cette année, quatre fois plus que lors de la période comparable de l’an dernier, selon des données de Thomson Reuters.

L’achat de la participation dans Morgan Stanley par Mitsubishi UFJ serait pour l’heure la plus grosse acquisition faite en dehors du Japon par un établissement financier nippon.

Mitsubishi UFJ a proposé en août 3,5 milliards de dollars pour racheter les 35% qu’il ne détient pas encore dans la banque régionale américaine UnionBancal et les analystes pensent qu’elle pourrait bien racheter une autre banque régionale aux USA.

DIVERGENCE CULTURELLE

Qu’en sera-t-il de Goldman Sachs envers SMFG?

« SMFG a toujours entretenu des liens très étroits avec Goldman Sachs; on ne peut donc exclure un rapprochement un peu plus général », dit Rogers, de Barclays Capital.

En 2003, Goldman avait acheté pour 150 milliards de yens de titres convertibles préférentiels de SMFG. Dans les années 80, le prédécesseur de SMFG avait aidé au renflouement de Goldman.

Quant à savoir ce que les banques japonaises peuvent réellement retirer de leur shopping international, la question se pose, au vu notamment des différences culturelles.

Pour Kirby Daley (Newedge Group, Hong Kong), il se peut que les banques japonaise veuillent simplement ne pas être à la traîne de l’internationalisation du secteur. Il évoque lui aussi des risques de trop grande divergence culturelle.

Dans le monde de la banque japonaise, la stabilité et l’ancienneté priment sur le mérite individuel et la profitabilité que cultive la banque américaine.

« On a d’un côté la banque d’investissement qui a l’appât du gain et de l’autre Mitsubishi, qui passe pour être l’une des banques japonaises à la culture la plus conservatrice », note Ina, du Credit Suisse, qui pense qu’une certaine distance de la part de la banque nippone s’impose pour maîtriser les points forts de la banque d’investissement.

Version française Wilfrid Exbrayat

Par David Dolan et Nathan Layne

TOKYO (Reuters) – Au bord du gouffre voici quelques années et symboles d’une conjoncture économique fort morose dans la deuxième économie mondiale, les banques japonaises participent maintenant au remodelage du paysage bancaire mondial.

Nomura Holdings, la première société de courtage japonaise, met la main sur les opérations asiatiques et européennes de la banque d’investissement américaine en faillite Lehman Brothers, moyennant 525 millions de dollars pour les premières, tandis que Mitsubishi UFJ Financial, première banque nippone, achètera jusqu’à 20% de Morgan Stanley pour 8,5 milliards de dollars au plus.

Du coup certains pensent que Goldman Sachs, qui, comme Morgan Stanley, va se transformer en banque commerciale, pourrait se tourner vers Sumitomo Mitsui Financial Group (SMFG), la troisième banque nippone avec laquelle elle entretient une relation ancienne.

Jadis considérées comme trop prudentes et inexpérimentées pour le monde à haut risque et à haut rendement de la banque d’investissement, les établissements japonais, débordants de ressources, font leur retour en force.

« L’équilibre des pouvoirs a changé spectaculairement ces deux dernières semaines dans le secteur financier mondial », commente Shinichi Ina, analyste de Credit Suisse à Tokyo. « Je pense que personne ne pouvait imaginer voici quelques mois que Mitsubishi prendrait Morgan Stanley dans son giron; je crois qu’elle-même ne pouvait l’imaginer ».

Les établissements financiers nippons ont pour l’essentiel évité les pertes massives qui ont mis les firmes financières de Wall Street en lambeaux. A la différence de leurs homologues occidentales, Mitsubishi UFJ et d’autres ont le plus souvent évité les investissements les plus risqués après avoir frôlé la catastrophe voici quelques années, ne devant leur salut qu’à une avalanche de deniers publics.

A présent, le maelstrom dans lequel est pris Wall Street a fait disparaître purement et simplement le modèle de banque d’investissement qui y avait prévalu pendant plus de 20 ans.

ASSAUT SUR LE REGIONAL US

L’accord passé entre Mitsubishi UFJ et Morgan Stanley accélèrera la transformation de l’établissement américain en une banque commerciale, améliorant ses chances de survie car il aura accès aux 1.100 milliards de dollars de dépôt de la banque nippone.

« Dans ce nouvel environnement, on admet je pense l’importance d’avoir des investisseurs stables et des affiliations avec de grandes institutions de dépôt, et dans ce domaine MUFG excelle », dit Jason Rogers (Barclays Capital).

Mitsubishi UFJ en retour siègera au conseil d’administration de Morgan Stanley.

Dans la mesure où la conjoncture économique locale ne s’est pas beaucoup améliorée et où la population décline, les banques nippones recherchent de plus en plus des opportunités de croissance à l’étranger.

Les acquisitions à l’étranger par les banques japonaises totalisent 12,5 milliards de dollars cette année, quatre fois plus que lors de la période comparable de l’an dernier, selon des données de Thomson Reuters.

L’achat de la participation dans Morgan Stanley par Mitsubishi UFJ serait pour l’heure la plus grosse acquisition faite en dehors du Japon par un établissement financier nippon.

Mitsubishi UFJ a proposé en août 3,5 milliards de dollars pour racheter les 35% qu’il ne détient pas encore dans la banque régionale américaine UnionBancal et les analystes pensent qu’elle pourrait bien racheter une autre banque régionale aux USA.

DIVERGENCE CULTURELLE

Qu’en sera-t-il de Goldman Sachs envers SMFG?

« SMFG a toujours entretenu des liens très étroits avec Goldman Sachs; on ne peut donc exclure un rapprochement un peu plus général », dit Rogers, de Barclays Capital.

En 2003, Goldman avait acheté pour 150 milliards de yens de titres convertibles préférentiels de SMFG. Dans les années 80, le prédécesseur de SMFG avait aidé au renflouement de Goldman.

Quant à savoir ce que les banques japonaises peuvent réellement retirer de leur shopping international, la question se pose, au vu notamment des différences culturelles.

Pour Kirby Daley (Newedge Group, Hong Kong), il se peut que les banques japonaise veuillent simplement ne pas être à la traîne de l’internationalisation du secteur. Il évoque lui aussi des risques de trop grande divergence culturelle.

Dans le monde de la banque japonaise, la stabilité et l’ancienneté priment sur le mérite individuel et la profitabilité que cultive la banque américaine.

« On a d’un côté la banque d’investissement qui a l’appât du gain et de l’autre Mitsubishi, qui passe pour être l’une des banques japonaises à la culture la plus conservatrice », note Ina, du Credit Suisse, qui pense qu’une certaine distance de la part de la banque nippone s’impose pour maîtriser les points forts de la banque d’investissement.

Version française Wilfrid Exbrayat

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