Guichets pris d’assaut, serviettes pleines à craquer de billet, la montée du yen au Japon produit ses effets sur les petits épargnants qui investissent en masse dans des devises étrangères. Pour eux, pas question de laisser passer l’occasion d’engranger des bénéfices plus tard.

Aligné dans la queue d’un bureau de change de Tokyo, Nobuyuki Sasaki s’apprête à vendre des yens contre des euros. Comme des milliers de petits épargnants, il veut profiter de la hausse de la monnaie japonaise pour engranger un bénéfice plus tard.

Ce septuagénaire n’a rien à voir avec les investisseurs professionnels et autres spéculateurs dont les transferts massifs de devises ont récemment bouleversé le marché des changes, faisant grimper le yen de 10% face au dollar et de 30% vis-à-vis de l’euro.

Mais comme de nombreux Japonais moyens, il profite de l’aubaine pour investir ses petites économies dans des devises étrangères.

« Cela vaut mieux que d’acheter des actions ou déposer mon argent à la banque, où il serait utilisé pour acheter d’autres banques qui vont se casser la figure », assure M. Sasaki en serrant son portefeuille.

Certains établissements sont pris d’assaut par des clients qui, pressés d’acquérir des devises, apportent des liasses de yens dans des serviettes pleines à craquer.

Le chef d’un bureau de change explique voir 600 personnes défiler chaque jour ces derniers temps, trois fois plus qu’à l’accoutumée. Il a triplé ses réserves d’euros, dollars, livres sterling et autres devises pour répondre à la demande.

Un engouement qui s’explique aussi par la perte de confiance dans la Bourse – celle de Tokyo a perdu quasiment la moitié de sa valeur depuis le début 2008 – et dans les banques, dont la crise financière a sapé la crédibilité.

« Je ne veux échanger que de l’argent liquide », explique Shinsaku Koyanagi, 33 ans, après avoir acheté pour 500.000 yens (4.300 euros) de dollars américains, dollars australiens et euros.

« Au lieu de posséder des biens immatériels, je préfère avoir quelque chose de visible, de tangible ».

Pour éviter les pertes, il diversifie son panier de devises étrangères et revend dès que la tendance haussière ou baissière d’une monnaie se retourne.

Selon Ryohei Muramatsu, un expert en devises à la Commerzbank, ces petits investisseurs échangent des devises pour réaliser un bénéfice « facile et rapide », une opération plus simple à réaliser de la main à la main qu’en ouvrant un compte en banque.

Certains veulent aussi mettre un peu d’argent de côté pour un voyage dans le pays de la devise achetée, ajoute-t-il.

Nombre d’entre eux se sont précipités ces derniers jours en prévoyant un rapide coup d’arrêt à la montée du yen. Un sentiment renforcé par des rumeurs évoquant une intervention du gouvernement japonais sur le marché des changes et une réduction du taux directeur de la Banque du Japon, afin de faire baisser le cours de la monnaie nationale.

Après être monté jusqu’à moins de 115 yens pour un euro et environ 90 yens pour un dollar la semaine dernière, le yen est effectivement redescendu aux environs de 129 yens pour un euro et de 99 yens pour un dollar jeudi.

« Je crois que le yen a atteint son plafond », affirme Hajime Yonezawa, 31 ans, qui a manqué une journée de travail pour se rendre au bureau de change.

Il revendra ses dollars dès que le billet vert aura retrouvé son niveau de 120 yens, atteint à l’été 2007 avant la crise du « subprime », assure-t-il.

Mais une mauvaise surprise pourrait guetter ces petits investisseurs, prévient M. Muramatsu à la Commerzbank, estimant que le yen pourrait monter jusqu’aux environs de 80 yens pour un dollar.

« Ces investisseurs ordinaires croient faire des bénéfices facilement parce qu’ils ne ressentent pas encore les conséquences de la crise économique. Mais revenez dans trois mois, les choses pourraient changer », prédit-il.

AFP

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